Enigme 650 – Trouver les Sentinelles

L’énigme 650 de la Chouette d’Or conduit à trouver les Sentinelles. C’est-à-dire les Bornes Saint Martin, non loin du Rocher de Dabo.

Je souligne ici la position remarquable de l’énigme 650 qui avec la 520 sont les deux constituant le dernier des cinq couples à parcourir depuis la B, le « dernier pas » en quelque sorte – le couple 530-780 étant le premier pas (d’après le titre de la 780).

Comprendre le titre

« Quand tout est révélé » dans son sens premier, indique que j’ai franchi un tournant dans cette résolution. J’ai achevé le triangle BCD sur la carte de France. Au second degré, le mot « tout » pourrait faire référence aux deux « tout » des deux charades de la 530 et de la 470. Mais ce lien a été infirmé par Max Valentin (Cf. synthèse du Figaro Magazine plus bas).

En revanche le mot « révélé » fait un lien direct avec la 560 dans « cherche l’Ouverture qui révèle la Lumière Céleste ». C’est donc à la lumière que ce titre fait référence. Et indirectement au rôle de l’Ouverture qui a permis de la trouver. Donc le pôle Sud.

Comprendre la carte …

Le texte de cette énigme est relativement simple à comprendre en apparence. A partir d’un point d’origine, je me place « dos à l’ouest » et reporte une distance de 8000 mesures pour localiser un lieu nommé « les Sentinelles ». Et une fois trouvées, je les passe en revue.

Je commence donc par me poser la question de savoir où je suis. Logiquement, là où j’ai terminé l’énigme précédente : Dabo. Ou plus exactement, là où est mon crayon sur la carte de France, au point D. Le bout du trait à ne pas regretter de la 560.

Je suis donc physiquement au Rocher de Dabo. Là où se trouve la borne IGN mentionnant l’altitude de 650 m au pied de la Chapelle Saint Léon. Mais ce raisonnement suppose que j’ai la carte de France 989 entre les mains.

Sauf que j’ai une autre alternative. Je suis à Dabo mais avec cette seconde carte qui a un sens symbolique superposé. Je suis donc en réalité dans la zone finale en un lieu qui correspond au point D. La question n’est pas de savoir si ce point est Dabo, mais de savoir laquelle des cartes porte mon raisonnement.

... pour comprendre le texte

Si je considère que 8000 mesures de 33 centimètres font 2 km 640, je me retrouve à reporter 2 millimètres sur la carte de France au 1/10 000 000ème depuis le Rocher de Dabo. C’est aussi absurde qu’infaisable. Je dois donc écarter la lecture usuelle de la carte de France. Il me faut donc identifier les caractéristiques de la seconde carte où reporter ces 8000 mesures. Tout en considérant que la carte de France n’est plus qu’un « bout de papier ».

La 780 m’avait donné le pôle sud de cette seconde carte comme le rappelle au second degré le titre de la présente énigme. Mais j’ai maintenant besoin de connaître son datum et son échelle – qui n’ont jamais été donnés depuis la 780. Je rappelle ici que le datum précise le type de projection utilisé.

Car si la carte de France est en projection cylindrique, méridiens et parallèles y sont des droites, rien ne dit qu’il en sera de même avec cette seconde carte. Les cartes plus précises, les IGN Série Bleue par exemple, sont en projection conique.

Des cartes pour lesquelles « Dos au ponant » n’est pas une ligne droite mais un arc-de-cercle. Il existe nombre de cartes plus précises, mais il paraît judicieux de se tourner vers une Série Bleue. Faciles à trouver dans le commerce, et plus aisées à utiliser pour un randonneur (or je suis un Piéton depuis la 780 !).

Pour reporter une distance sur une carte en projection conique, je peux utiliser la technique du report par le méridien, seule ligne qui ne souffre d’aucune distorsion car une projection conique ne conserve pas les distances sauf sur un méridien.

Il me faut donc trouver le méridien le plus proche de la zone où je souhaite faire une mesure en utilisant un quadrillage de référence (Lambert, UTM, etc.). Puis je reporte ma mesure verticalement sur ce méridien pour enfin la faire pivoter horizontalement et être dans l’axe Ouest-Est.

Ainsi, ayant cette compréhension d’une carte en projection conique, le texte de la 650 a un sens différent de celui qu’il pouvait avoir sur la carte de France en projection cylindrique.

L’Orthogonale me donne un méridien de référence

Depuis la 780, je sais où est le Sud sur ma seconde carte. Depuis l’énigme 500, je sais que aussi que l’Orthogonale est une double-portée dont les lignes donnent « FACE GB ». Donc une orientation de la clef de FA (Dabo) vers la clef de SOL (Carignan), face à la Grande Bretagne (Albion n’est plus dans mon dos !). Dès lors, mon Orthogonale est un parallèle orienté de l’Ouest vers l’Est.

Cependant, la lecture que j’ai désormais de ma seconde carte en projection conique amène un nouveau constat. La longueur du segment Dabo-Carignan est de 18,5 centimètres sur la carte de France (pour 185 km sur le terrain). Or sur une carte Série Bleue, cette longueur est la moitié des 37 centimètres qui séparent deux parallèles de 5 minutes de latitude – soit 5 milles nautiques (5 nm).

Ce qui veut dire que l’Orthogonale est aussi un méridien gradué ce qui est justement la situation dans laquelle je dois être pour calculer correctement un report d’Ouest en Est d’une longueur calculée sur un méridien. La technique du report du méridien est donc naturellement définie sur l’Orthogonale par mes hypothèses.

Dit autrement, j’ai 2,5 minutes d’écart de latitude entre les points D et C reportés sur un méridien d’une carte conique – donc 2,5 nm – soit 4,63 km.

Conjointement, ce même segment Dabo-Carignan fait aussi 185 km soit 100 nm. J’ai ainsi une double lecture de l’Orthogonale en milles nautiques :

Tableau de la double lecture de l'Orthogonale sur la carte de France et une IGN Série Bleue

Figure 1 La double-lecture de l’Orthogonale

Comprendre Dos au Ponant

Si je regarde les deux textes de la 650 dans le cahier des charges de Michel Becker, je comprends qu’un azimut donné en clair « Nord-Nord/Est 11° » a été remplacé par un « Dos au Ponant » en apparence incompréhensible. Il s’agit ici d’un choix de Max Valentin de renforcer la fin de la résolution en supprimant une information.

« Dos au Ponant » me renvoie donc sur l’Orthogonale parallèle et méridien, c’est-à-dire à une méthode de calcul des 8000 mesures. Ce « Dos au Ponant » n’est donc pas l’azimut dont j’ai besoin pour reporter le point. Seulement la manière dont j’utilise la seconde carte.

Ce qui veut dire que je dois chercher les Sentinelles depuis la Chapelle Saint-Léon sans connaître l’azimut. Seulement avec le rayon de 2km640 (donc 10,6 centimètres) sur la carte IGN 1/25000.

En quoi est-ce surprenant de ne pas avoir l’azimut ? Puisqu’en 420, pour calculer la position de la Flèche d’Apollon, je n’avais que la distance de 55,9 cm sur la carte de France ?

Trouver les Bornes Saint-Martin

Je considère que je suis à la Chapelle Saint-Léon. Et je reporte 8000 mesures de 33 cm, donc 2,64 km, cela revient à reporter 10,6 centimètres sur une carte série bleue au 1/25 000ème.

En fait, il fallait donc trouver les Sentinelles à tâtons, en cherchant autour de Dabo. Ce que de nombreux chasseurs ont fait sans pour autant avoir tout mon raisonnement.

Je considère maintenant l’ancien cap donné Nord-Nord/Est 11°.

En mesurant l’azimut de la Chapelle Saint-Léon aux Bornes Saint-Martin (sur Géoportail – axe que je nomme F-BSM), je trouve un angle de 15,31°. Conjointement, l’azimut du carroyage Lambert est de 3,67°. Le cap final est donc de Nord-Nord/Est 11,6°. Je résous donc ici l’ancienne énigme qui permet de trouver les Bornes Saint-Martin en 650.

C’est donc légitimement que je conclus que les Sentinelles sont les trois Bornes Saint-Martin.

La trahison de la boussole

La boussole m’avait trahi en 560. Puisque j’ai quitté Cherbourg dos au Nord, mais en ignorant sa position sur la seconde carte. Ici elle ne me trahit pas. Mais je devais m’en méfier tout de même car une boussole ne donne pas nécessairement un azimut. Une ligne droite ne veut rien dire sur une carte en projection conique !

Passer en revue les Bornes Saint-Martin

Le site est connu et largement documenté. Ce lieu-dit est un point triple qui définit la limitation administrative des communes de Dabo, d’Haselbourg et de Haegen.

Source : https://pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/IA57000669

Le site des Bornes Saint-Martin

Passer en revue les Sentinelles revient à les examiner une à une. Comme aucun ordre n’est donné par le livre, cela signifie que cet ordre n’a aucune importance et que tout simplement, je dois identifier l’une des bornes et la choisir car elle est différente.

Et en effet, comme le montre la photo ci-dessus, il n’y a en réalité qu’une seule borne porteuse de deux nombres : les années 1750 et 1828.

Comprendre le visuel

Le visuel représente une silhouette tenant une pelle devant trois silhouettes représentant les Sentinelles, gardiens symboliques de la contremarque. Ce visuel me confirme donc que la zone où chercher la contremarque est identifiée par les Bornes Saint-Martin en ce sens qu’elles sont un élément dans cette zone sans la délimiter pour autant – d’autant que le Rocher de Dabo identifie aussi ma zone aussi.

Ce visuel représente aussi le passage en revue, indiquant qu’il me faut, une fois sur place, passer en revue ces bornes pour trouver celle que je dois isoler. En outre, j’ai un bloc de chiffres sur le visuel qui me permet de choisir la borne qui est gravée de chiffres, les deux autres « bornes » n’étant que des rochers sans indications.

71721075 : un nombre à garder en réserve

Le visuel m’offre le nombre 71721075. Si je considère que j’ai ici une fraction du jour sidéral et en utilisant à nouveau la vitesse de la lumière comme en 420, je trouve par le calcul une distance de 360,4 km, donc 36 centimètres si elle était sur la carte de France. Je garde en réserve cette distance : elle est la clef de passage vers la dernière énigme, la 520.

Les IS concernées

Une seule IS est relative à cette énigme :

« IMMOBILES ET FIDÈLES, TANGIBLES ET MASSIVES, SEMBLABLES ET DISSEMBLABLES, CE SONT LES SENTINELLES »

Cette indication supplémentaire se veut descriptive des Sentinelles et par allusion en indique le nombre puisque 3 couples d’adjectifs les décrivent. Cependant, il est probable que le sens réel de cette IS viendra avec leur découverte sur le terrain.

La synthèse du Figaro Magazine

Synthèse du Figaro Magazine - Enigme 650
Synthèse du Figaro Magazine – Enigme 650

Quelques remarques :

« De cet endroit, il vous serait impossible de voir physiquement les Sentinelles » me permet de comprendre qu’à 8000 mesures de distance, il n’est pas possible de voir les Sentinelles, soit parce qu’elles sont trop loin, soit parce qu’un obstacle l’empêche.

« Sachant où elles se trouvent, vous pourriez les passer en revue sans l’aide des énigmes précédentes » … et c’est effectivement le cas, ayant les bornes Saint-Martin, je n’ai pas besoin de tout ce qui a précédé pour isoler celle qui est porteuse de dates.

« […] n’ont d’importance […] pas plus que la distance entre l’homme à la pelle et les trois silhouettes ».

Cette distance entre l’homme à la pelle et les trois silhouettes n’est pas celle des 8000 mesures : c’est la distance entre les Sentinelles et moi quand je les passe en revue, donc après avoir franchi les 8000 mesures. Mais il faut reconnaître que le visuel est trompeur et laisse penser que cet espace entre les personnages serait la distance arpentée pour trouver les Sentinelles.

Le cahier des charges de Becker

Les deux versions du cahier des charges sont identiques pour la réalisation du visuel : rien n’indiquait qu’il fallait peindre trois silhouettes.

Les deux textes apportent trois nuances : les Sentinelles, rebaptisées Gardiens sont redevenues les Sentinelles dans l’énigme.

Mais surtout, « Dos au Ponant » était initialement un cap « Nord-Nord/Est 11° » : je sais pourquoi maintenant.

J’étais censé avoir des ailes me permettant de voler, une notion qui a complètement disparu du texte final de la 650. Cela signifie simplement que depuis le Rocher de Dabo pour aller jusqu’aux Bornes Saint-Martin, je le fais « à vol d’oiseau » donc pas comme le piéton de la 780, mais plutôt avec une carte – la seconde.

Détail intéressant offert par l’ancien texte de la 530 qui introduit la distance de 100 lieues du rebord de la carte à Bourges : cette distance vaut justement 240 milles nautiques.